La Chaîne d’Union « L’alchimie des francs-maçons »
Revue d’études maçonniques, philosophiques et symboliques du Grand Orient de France
21 juillet, 2025 par
La Chaîne d’Union « L’alchimie des francs-maçons »
Yonnel GHERNAOUTI

Conform édition, N° 110, octobre 2024, 96 pages, 13 € - 17 € port compris

Le numéro 110 de La Chaîne d’Union (LCU) s’articule autour de l’idée intrigante de l’alchimie en franc-maçonnerie, une thématique qui s’épanouit dans un dialogue entre mysticisme ancien et quête moderne du sens. Le rédacteur en chef, Jacques Garat, introduit une réflexion en tension : certains francs-maçons, attachés à une pensée rationnelle, s’éloignent de l’alchimie, tandis que d’autres la considèrent comme une voie d’exploration symbolique féconde. Cette ambivalence révèle une franc-maçonnerie multiple, où la quête de l’esprit rencontre l’héritage d’une tradition secrète et allégorique.

Une plongée dans l’alchimie antique avec Stéphane Itic

Le dossier s’ouvre avec Stéphane Itic, qui examine l’alchimie des premiers siècles en Égypte et en Grèce, incarnée par Zozime de Panopolis, initiateur de la fusion entre techniques artisanales et mysticisme hermétique.
En se concentrant sur l’allégorie et le symbole, il montre comment l’opérateur, dans son travail de laboratoire, n’engage pas seulement sa science, mais aussi son âme.

Cette vision d’une alchimie introspective, reliant purification matérielle et élévation spirituelle, propose une lecture de l’alchimie comme chemin initiatique, en harmonie avec certains fondements maçonniques.
Ce parallèle entre transformation matérielle et transmutation intérieure trouve son écho dans les loges, où l’alchimie devient autant quête de la « pierre » intérieure que dialogue avec la matière.

Jules Mérias : des traces alchimiques dans les textes maçonniques anglais

Jules Mérias, quant à lui, ancre sa réflexion dans les rituels et catéchismes de la franc-maçonnerie anglaise, mettant en lumière une influence judéo-chrétienne ancrée dans l’Ancien Testament et les Évangiles.

Mérias propose une analyse méthodique des premiers textes maçonniques, s’efforçant de saisir dans leurs symboles ce qui pourrait s’apparenter à des traces alchimiques.
Ce travail d’exégèse montre que l’alchimie, loin d’être un simple ajout exotique, trouve des correspondances dans une symbolique biblique partagée, offrant une légitimité à cette vision spirituelle au sein de la franc-maçonnerie.

Laurent Segalini : l’empreinte hermétique des loges opératives

L’historien et docteur en anthropologie Laurent Segalini, par ailleurs attaché de conservation au musée de la franc-maçonnerie et chargé des collections, poursuit en dévoilant une empreinte hermétique indéniable dans la franc-maçonnerie opérative du XVIIIe siècle.

L’attrait pour l’hermétisme dépasse la simple influence et s’immisce jusque dans les rituels des loges.
Cette fascination pour l’alchimie et pour le symbole de la « pierre » crée des résonances entre deux traditions qui, bien que distinctes, partagent un langage commun.

Segalini révèle ainsi une maçonnerie opérative investie d’une quête à la fois spirituelle et matérielle, où l’homme se change en alchimiste de lui-même, aspirant à la pierre philosophale intérieure.

Dominique Jardin : une tradition « transmutée » plus qu’héritée ?

Enfin, Dominique Jardin propose une approche historico-critique, affirmant que l’alchimie en franc-maçonnerie relève davantage d’une tradition inventée, notion qu’il emprunte à l’historien Éric Hobsbawm.

Il souligne comment cette « tradition transmutée » s’est constituée autour de correspondances symboliques servant de repères aux initiés.
Jardin questionne ainsi la légitimité de l’alchimie dans l’héritage maçonnique, et explore cette appropriation comme un choix plus constructif que véritablement ancestral.

Une franc-maçonnerie en tension entre tradition et modernité

Ce dernier numéro de La Chaîne d’Union plonge le lecteur dans une réflexion riche et nuancée sur les affinités entre alchimie et l’art royal.
En retraçant des filiations mystiques et des divergences d’interprétation, il invite à reconsidérer la franc-maçonnerie comme espace paradoxal de modernité et de perpétuation des traditions.

La Chaîne d’Union « L’alchimie des francs-maçons »
Yonnel GHERNAOUTI 21 juillet, 2025
Partager ce poste
Étiquettes
Archiver