Revue de la Grande Loge de France – Vivre la tradition
GLDF, #214, Décembre 2024, 120 pages, 8 €
Intitulée « Les chemins de la connaissance », cette dernière livraison de l’année 2024 constitue une invitation profonde à parcourir les multiples sentiers qui mènent vers cette lumière insaisissable qu’est la connaissance. Sous la plume de différents auteurs, la revue éclaire des perspectives variées, allant des fondements initiatiques aux symboles, des principes de la fiction jusqu’aux interrogations sur la raison et l’intuition. Il s’agit d’un véritable voyage au cœur de ce qui fait l’essence même de la recherche humaine : comprendre pour être, transmettre pour éveiller.
L’éditorial d’Olivier Balaine
L’éditorial d’Olivier Balaine, directeur de la rédaction, ouvre magnifiquement cette réflexion en plongeant au cœur du mystère de l’être. Il explore le besoin fondamental de l’humanité de se questionner, de transcender la simple survie pour accéder à une compréhension plus vaste de soi-même et du monde. Citant la célèbre injonction de l’oracle de Delphes, il invite le lecteur à « se connaître lui-même » pour s’inscrire dans une démarche initiatique, où la quête de sens prime sur les certitudes. Olivier Balaine souligne que les pensées les plus profondes ne peuvent prendre vie qu’à travers l’expérience : une observation qui résonne parfaitement avec la dynamique initiatique de la franc-maçonnerie. Ce texte vibrant appelle chacun à embrasser les chemins de la connaissance avec humilité et curiosité, en restant toujours ouvert à l’inconnu.
Le mot du Grand Maître
« Le mot du Grand Maître » poursuit cette réflexion en interrogeant la notion même de connaissance. Thierry Zaveroni, Grand Maître de la Grande Loge de France, évoque avec profondeur les diverses formes de savoirs : celui que l’on acquiert par les livres et l’instruction, mais aussi celui qui émane de l’expérience intime et spirituelle. Il souligne le rôle essentiel des symboles dans le cheminement initiatique, ces clés universelles qui permettent à l’homme de transcender les limites de sa compréhension immédiate. En écho à cette quête, il insiste sur l’importance de cultiver un esprit de transmission, non pas comme un simple transfert de savoirs, mais comme un partage vibrant d’une lumière vivante. Ce mot, empreint de sagesse, rappelle que la franc-maçonnerie, loin d’être figée, s’inscrit dans un mouvement perpétuel d’éveil et de progrès.
Les contributions des auteurs
Frédéric Mostacci
Frédéric Mostacci ouvre la voie en rappelant que l’initiation n’est pas une fin, mais un commencement. Elle dépouille l’adepte de ses certitudes pour lui révéler un horizon où raison et intuition ne s’opposent plus mais s’imbriquent. La connaissance, dans ce contexte, devient une transformation, une alchimie spirituelle où l’être se recrée à la lumière de son propre cheminement.
Robert de Rosa
Robert de Rosa, quant à lui, explore la voie symbolique avec une acuité remarquable. Les symboles, ces ponts entre le visible et l’invisible, s’offrent comme autant de clefs ouvrant les portes de l’inexprimable. Ce parcours initiatique au cœur des symboles engage à une lecture introspective où chaque étape devient une pierre d’angle dans l’édification de soi. Nous lui devons aussi, en fin de revue dans la rubrique « L’air du temps », un traitement du sujet énoncé en titre, ajoutant une réflexion contemporaine à son exploration symbolique.
Lorenzo Soccavo
Lorenzo Soccavo nous transporte ailleurs, au cœur de la fiction, en tant que matrice de connaissance. La fiction, loin d’être un simple échappatoire, s’affirme comme un miroir où l’humanité contemple ses doutes et ses aspirations. Elle participe au travail initiatique, recréant le monde dans une fresque où raison et imaginaire cohabitent harmonieusement.
Olivier Smadja
Le texte d’Olivier Smadja interroge l’essence même de la connaissance : qu’est-ce que connaître ? Par cette question simple mais abyssale, il pousse le lecteur à réfléchir à la posture du chercheur et au sens ultime de la quête. Savoir, c’est à la fois s’élever et se dépouiller, et surtout, c’est accepter de rester en chemin, toujours en devenir.
Benoît Guilbert
Benoît Guilbert s’engage dans un éloge du doute. Il le présente comme un moteur essentiel de la quête initiatique. Douter, c’est écarter les dogmes et laisser place à l’émergence d’une compréhension plus subtile. Ce doute, tel que dépeint ici, ne paralyse pas, mais nourrit l’élan vers une vérité toujours en mouvement.
Arthur Renaud
Arthur Renaud, dans son texte « Être et apprendre », affirme qu’il est difficile d’imaginer pouvoir apprendre sans être, mais que l’on peut être sans apprendre. Ce paradoxe souligne la nécessité de chercher à se construire pour mieux percevoir les chemins de la connaissance. Il met en avant le rôle central de la Loge, véritable égrégore où peuvent germer les graines de la connaissance, et qui incarne cet être partagé par excellence.
Jean-Pierre Thomas
Jean-Pierre Thomas apporte une perspective historique précieuse avec son article « La franc-maçonnerie et l’enseignement, de l’Instruction publique à l’Éducation nationale ». Il y explore le rôle fondamental des maçons dans l’élaboration de l’instruction publique telle qu’elle a été conçue sous la IIIe République. Ce texte met en lumière l’action conjuguée de nombreux Fils de la lumière, qui ont œuvré pour un accès universel au savoir et à l’émancipation intellectuelle par l’éducation.
Portrait d’initié : Fernand Fourreau
Dans « Portrait d’initié », Jean-Pierre Thomas nous plonge également dans la vie de Fernand Fourreau, explorateur et franc-maçon. Ce récit illustre une quête incessante de connaissance, non seulement géographique mais également spirituelle, et offre un bel exemple de ce que signifie être un voyageur éclairé par les idéaux maçonniques.
Fabien Brial
Fabien Brial, dans la rubrique « D’Orient et d’Occident », nous raconte l’histoire de la Grande Loge de France à La Réunion. Cet article jette un pont entre les traditions maçonniques locales et les perspectives universelles, soulignant l’importance de la franc-maçonnerie dans des contextes culturels variés.
François Gruson
Dans « Morceaux d’architectures », François Gruson traite des chemins de la connaissance à travers le prisme du « voyage immobile », une réflexion sur la manière dont l’introspection peut remplacer l’exploration physique pour atteindre des sommets de compréhension.
Daniel Sigy
Daniel Sigy, dans « Arrêt sur l’image », nous invite à « ouvrir les persiennes » avec l’artiste peintre Serge Elias, dont une œuvre illustre la première de couverture. Cette approche visuelle et symbolique propose une réinterprétation des frontières entre intérieur et extérieur, éclairant les notions de lumière et de perception.
Hugo Billard
Dans la rubrique « Symbolique », Hugo Billard explore « Le silence, ou la redécouverte de soi ». Il y met en lumière comment les rythmes maçonniques, faits de mots, gestes et objets, ouvrent des portes vers une introspection profonde et universelle.
Rubriques complémentaires
Enfin, le « Quiz de Patrick » et les réponses au précédent offrent une manière ludique mais enrichissante de tester ses connaissances tout en apprenant davantage sur les thématiques abordées dans ce numéro. La rubrique « Recensions » coordonnée par Frédéric Pesquier et Jean-Pierre Thomas apporte un panorama critique des ouvrages récents, enrichissant encore ce numéro déjà dense.
La dernière page annonce le sommaire du prochain numéro, prévu pour mars 2025, poursuivant la promesse d’une réflexion toujours renouvelée sur les chemins de la connaissance. La thématique sera « Je ne sais ni lire ni écrire ».
Les entretiens
Marie Balmary
Dans cette mosaïque d’approches, deux entretiens se distinguent par leur richesse spirituelle. Marie Balmary, psychanalyste et essayiste, déploie une approche inédite de la lecture biblique, débarrassée des carcans dogmatiques. Elle ouvre une brèche vers une connaissance intuitive, enracinée dans une rencontre directe avec le texte.
Annick de Souzenelle
Annick de Souzenelle, dans un entretien émouvant recueilli par Olivier Balaine, évoque avec une poignante lucidité l’exil de l’humanité. Elle décrit cet exil comme une rupture entre l’homme et sa dimension sacrée, un éloignement du centre spirituel qui donne sens à l’existence. Dans ses propos, elle insiste sur la nécessité d’une réconciliation avec le divin, qui passe par une relecture symbolique des écritures bibliques et un retour à l’arbre de vie, symbole universel de l’unité et de la connaissance. Elle invite chaque individu à entreprendre un cheminement intime pour redécouvrir la richesse de cette dimension oubliée, à l’écart des dogmes et des certitudes immobiles. Par cet appel, Souzenelle propose une vision profonde où l’humanité peut transcender ses fractures intérieures pour être pleinement alignée avec son essence sacrée. Cet hommage vibrera encore longtemps dans les cœurs de ceux qui cherchent à retrouver leur élan spirituel.
Conclusion
Au fil des pages, PVI n°214 résonne comme une mélodie où chaque auteur ajoute sa note à l’harmonie de la quête. C’est une invitation à transcender les clivages entre intuition et raison, à emprunter ces chemins sinueux qui mènent vers une vérité en perpétuel devenir. Profondément ancré dans la tradition maçonnique, ce numéro nous rappelle que la connaissance est moins un aboutissement qu’une expérience à vivre, une lumière à cultiver dans l’obscurité.